Discours prononcé avant la distribution des Prix

Le 25 août 1733

Claude-François-Alexandre HOUTTEVILLE

DISCOURS

Prononcé avant la diftribution des Prix le 25 Août 1733, par M. l’Abbé HOUTTEVILLE, Directeur de l’Académie.

 

Nous allons diftribuer les prix, & nous le faifons avec autant de joie que nous avons eu de peine à remettre deux fois celui d’Eloquence ; car c’eft toujours à regret que l’Académie fe voit contrainte à cette efpèce de févérité. Mais enfin nous nous la devions, nous la devions au public ; pour tout dire, nous la devions aux prétendans eux-mêmes. De quel prix aurait été pour le vainqueur une couronne que l’eftime n’auroit point décernée, & qu’il n’aurait dûe qu’à l’indulgence de fes Juges ? Un triomphe pareil eût été fans gloire pour lui, fi même il n’eût été fon affront & le nôtre. Heureufement notre rigueur apparente a eu le fuccès que nous en avions efpéré. Elle a ranimé le génie & l’émulation qui fembloient s’être refroidis ; le nombre des concurrens s’en en accru ; les pièces de prote en ont été plus fages, plus régulières, d’une élégance plus foutenue, brillantes de plus de beautés, obfcurcies par moins de défauts & plus légers. Dans un jour confacré aux éloges & à la gloire des vainqueurs, j’aurois tort de parler de défauts, fi l’on ne favoit qu’il n’y a point eu, qu’il n’y aura jamais d’Ouvrages en tout fens irréprochables, & que fi nous donnons le prix à des efforts heureux, nous n’exigeons pas des fuccès impoffibles.